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Jeanne d'Arc censurée ?

Une rumeur insistante

news du 6 juillet 2012
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Je n'ai pas l'habitude de reprendre sur ce site les rumeurs qui courent le milieu de la Bande Dessinée à mon propos ou à celui de mes albums. Mais aujourd'hui, je suis contrainte de faire une exception.

Ceux d'entre vous qui suivent régulièrement mon actualité se souviennent sans doute que j'ai publié l'an dernier une Jeanne d'Arc iconoclaste aux éditions Dupuis avec Jeanne Puchol au dessin. Le second et dernier tome devait paraître en janvier dernier. Or, quelques semaines avant la parution, alors que l'album était terminé et payé, Jeanne et moi avons appris que ce livre ne verrait jamais le jour. Le motif invoqué était classique en cette période difficile : les ventes du tome 1 n'étaient pas suffisantes. Nous avons donc accusé le coup et accepté cette sanction du marché, comme disent les financiers.

Nous avons cherché un nouvel éditeur et nous l'avons trouvé en Marie Moinard, fondatrice des éditions Des Ronds dans l'O. Une intégrale en noir et blanc, Moi, Jeanne d'Arc, est donc parue en mai. Je pensais que l'histoire s'arrêterait là, mais ce ne fut pas le cas.

Depuis quelques mois, des auteurs, des éditeurs, des membres mêmes de Media Participations, groupe propriétaire de Dupuis, me répètent ainsi qu'à Jeanne Puchol, que ce n'est pas pour des motifs économiques que notre diptyque a été arrêté, mais qu'il a été censuré en raison de l'image qu'il donnait de la Pucelle d'Orléans, cette sainte française devenue si chère aux intégristes catholiques et autres membres de l'extrême droite française. De mystérieux "actionnaires" ou autres personnes influentes n'auraient pas supporté qu'on montre les poils pubiens de Jeanne d'Arc en couverture, qu'on fasse d'elle une lesbienne épanouie, allant à des sabbats orgiaques et plus préoccupée de son épanouissement personnel que des volontés divines…

Cette histoire de censure est-elle vraie ? Est-elle fausse ? Je n'en sais vraiment rien. J'espère sincèrement qu'elle est fausse.

Simplement, je ne peux plus ne pas parler. Cette rumeur insistante a fini par sortir dans la presse, sur le site France Soir, et on nous interroge maintenant souvent à ce sujet. Il y a quelques jours, Jeanne Puchol s'est retrouvée à devoir répondre, pendant un direct de France Bleu Orléans, à des questions sur cette censure.

Que ce soit clair, ni Jeanne, ni moi ne contestons le droit des éditions Dupuis de mettre fin à notre collaboration, quel que soit le motif de leur décision. Leur politique éditoriale leur appartient totalement. Leurs responsables éditoriaux ont même fait tout ce qu'il fallait pour que cet arrêt se passe aux mieux, et nous en les en remercions.

Reste le fond. Si notre Jeanne d'Arc a vraiment été censurée, je trouverai surtout ça grotesque. On est en 2012, tout de même. Personne ne peut penser que j'ai voulu révéler la vérité sur le personnage historique ou la sainte catholique avec ce livre. Au contraire, c'est évidemment une fiction ludique, qui, par son décalage revendiqué, donne à réfléchir sur ce qu'était le statut d'une femme au Moyen-Âge, et, par là, j'espère, parle aussi de la liberté des femmes aujourd'hui. Et je n'ai pas du tout envie de penser que c'est cette revendication féminine qui a, peut-être, été censurée.

Valérie Mangin