La légende d'Attila La rapidité et la violence destructrice des raids d’Attila impressionnèrent tous les chroniqueurs de son temps. Tous étaient des ecclésiastiques. Certains virent immédiatement en lui un instrument de Dieu. Par l’intermédiaire du Barbare, celui-ci venait châtier les mauvais croyants. Dès 453, l’année même de la mort du roi hun, le pape Léon Ier le Grand synthétisa cette idée en comparant l’invasion de l’Italie de 452 à un “flagellum Dei”, un “fouet de Dieu” en latin. Le pape savait de quoi il parlait: il se trouvait lui-même à Rome quand Attila avait menacé la ville. Selon une tradition incertaine, il aurait même participé à l’ambassade qui réussit à convaincre le roi d’arrêter les pillages et de quitter l’Italie. Mais il fallut presque 200 ans pour que l’expression soit appliquée à Attila lui-même. L’archevêque Isidore de Séville, mort en 636, le décrivit le premier comme la "virga furoris Dei”, “verge de la colère de Dieu”, toujours en latin. Ces prêtres tout imprégnés de culture chrétienne se situaient dans la plus pure tradition biblique : le souverain babylonien Nabuchodonosor II qui écrasa en 507 avant Jésus-Christ le royaume juif de Juda était déjà qualifié de “verge de la colère de Dieu” par le prophète Esaïe.Mais cette origine savante était inconnue de la plupart des légendes médiévales postérieures qui apportèrent une autre explication, beaucoup plus romanesque au surnom d’Attila. Il lui aurait été donné la veille de la bataille des Champs catalauniques par un ermite. Le vieillard lui prédit aussi sa future défaite. L’orgueilleux roi n’étant qu’un instrument de Dieu, celui-ci pouvait à volonté l’élever ou le briser. Et le lendemain il le briserait, l’ermite en était sûr... La traduction française que nous connaissons, “fléau de Dieu” date seulement du 19è siècle. Elle est ambigüe mais il faut toujours comprendre “fléau” au sens d’instrument servant à battre les céréales, de fouet et non de grand malheur comme on le croit souvent. |
Attila "flagellum dei", Chartreuse de Pavie, Italie. © Edward Gibbon, Décadence et chute de l'empire romain, PML, 1987. |