Valérie Mangin entraîne le lecteur dans un Paris fictif qui réinterprète complètement la vie de Balzac. Une jolie prouesse.
Et si Balzac était pourri jusqu’à la moelle ? Et s’il n’avait rien écrit de valable de ses propres mains ? Ce Balzac-là a certes bien la moustache épaisse et le ventre adipeux comme l’original, mais son personnage est à l’opposée de celui, historique, du père de La comédie humaine. Valérie Mangin etGriffo nous entraînent dans un Paris fictif du milieu de XIXe siècle oùl’écrivain est aspiré dans une intrigue policière quasi-fantastique.Il a déjà rencontré le succès avec Les chouans. Dès lors, il publiequotidiennement dans La revue de Paris un chapitre de son nouveaulivre, La peau de chagrin. Mais un jour, son éditeur décide de retirer lachronique et de la remplacer par une autre très étrange et anonyme :une biographie instantanée de Balzac lui-même. Bientôt le texterévélera les secrets pourtant bien cachés par l’auteur. Plus bizarreencore : ce nouveau roman prédit ses réactions jusqu’au moindredétail. Balzac se retrouve aux commandes d’une course poursuite haletante où seul importe de connaître l’origine de ce papier.
Mise en abyme
Cet ouvrage surprenant retrace complètement l’histoire de l’écrivain sans jamais, pour autant, être hors de l’hommage. Balzac devient le personnage de la propre parodie de sa vie. Pour ce faire, les auteurs jouent sur l’idée dela mise en abîme : celle du personnage qui se lit en train de lire. L’image elle-même, oin de se cantonner à raconter simplement les scènes, participe également à cette mise en abîme : reproduction à l’identique du dessin d’une case mais avec une technique différente qui fait penser à la gravure.
Car cette petite prouesse ne repose pas uniquement sur la scénario dynamique de Valérie Mangin, qui a surtout travaillé sur des BD de fantasy (Le fléau des dieux...). Le trait de Griffo (L’ultime chimère), réaliste et grossier à la fois, est très efficace. Les couleurs sont d’une grande beauté, tirant sur les ocres et rouges. Un véritable plaisir graphique.
Du reste, cet ouvrage est le premier d’un triptyque mené par Valérie Mangin qui invite pour la suite deux autres auteurs, Loïc Maltani et Denis Bajram. Encore du Balzac, pour le coup : le deuxième tome, qui sortira en février, s’intéressera auréalisateur Henri-Georges Clouzot en train de faire un film sur l’écrivain. En mars, le dernier volume se portera sur Valérie Mangin, travaillant sur des BD concernant Balzac et Clouzot. Une mise en abîme appuyée, vacillant toujours entre fiction et réalité.
Gwendal Fossois
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