Le 22 février sortait en librairies le tome 2 de la trilogie Abymes, scénarisée par Valérie Mangin. Cette fois avec Malnati au dessin, et l’illustre quoique très controversé cinéaste HenriGeorgs Clouzot pour sujet. De quoi alimenter un récit pour le moins intrigant, et gagner ce second pari haut la main.
1946 : Clouzot est en pleine réalisation de son dernier opus prévu, Le Mystère Balzac. Pourtant, même avec la mobilisation des médias par les meurtres atroces perpétrés par le Dr Petiot, les accusations de collaboration avec les nazis qui entourent sa reprise du cinéma ne tarissent pas et entravent considérablement le bon déroulement du tournage, malgré la bénédiction de Barant- Rondeau, figure notable de la résistance qui finance le film. Et ce, sans compter l’insertion de scènes compromettantes qu’il n’a jamais tournées dans les rushes destinés au montage, rendant Clouzot maladivement méfiant envers son équipe au complet... A tort ou à raison ? En tout cas, et nous le savons dès les premières pages, un sort funeste attend notre homme.
Avec ce second tome, Mangin pousse encore plus loin l’expérience en mettant également la série elle-même en abyme : en effet, dans un récit une nouvelle fois savamment orchestré pour mêler sans heurts fiction et faits réels, le fameux réalisateur tourne un film reprenant le scénario du premier tome sur Honoré de Balzac. La folie paranoïaque de ce dernier touche d’ailleurs vraisemblablement Clouzot à son tour : violent, incohérent et impulsif, il se rapproche de façon frappante de son personnage principal et le scénario réussit la prouesse d’inquiéter le lecteur, et de susciter son empathie envers cet homme qui a tout de détestable à première vue.
En plus des couleurs un peu passées, et de l’ambiance graphique qui collent à merveille aux époques dépeintes et donnent une touche « roman noir » au récit, une patine d’irréel est ajoutée par le procédé stylistique à ces deux tomes, un doute planant sur les événements qui peut suggérer une explication fantastique, surnaturelle et qui fait chercher l’éclaircissement, qui souvent est bien plus terre-à-terre que l’on ne s’y attend.
Alix de Yelst
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