La mise en abymes, on commence à connaître, de la Vache qui Rit dont l'image se décline à l’infini dans sa propre image montée en boucle d’oreille, aux savantes élaboration de MarcAntoine Mathieu qui creuse la logique de la BD jusqu’à l’hystérie. Valérie Mangin s’y essaie en trois tomes, avec trois dessinateurs différents.
Le premier volume, dessiné par Griffo, est consacré à Balzac, en pleine écriture de son roman La Peau de chagrin , qui paraît en feuilleton dans un journal de l’époque (nous sommes en 1831). Mais l’écrivain s’aperçoit que les épisodes publiés précèdent ceux qu’il n’a pas encore écrit, et vont même jusqu’à prédire les futures actions de l’auteur luimême. De quoi perdre la boule, d’autant que certaines révélations publiées concernent de près la vie privée d’Honoré et sont bien embarrassantes.
Le tome 2 prend une autre célébrité pour personnage principal, le cinéaste HenriGeorges Clouzot, que l’on attend pour la première présentation au public de son film Le Mystère Balzac, en septembre 1946. Ici, c’est le cinéaste qui semble perdre le contrôle de son film en cours de tournage, avec des scènes inédites qui apparaissent au visionnage des rushes. C’est encore l’époque du procès docteur Petiot et Clouzot est soupçonné d’avoir été un « collabo », alors que les grèves des techniciens communistes perturbent le tournage. Quant aux images mystérieuses, elles desservent, c’est le moins que l’on puisse dire, l’idée que l’on peut se faire du réalisateur, pas très délicat avec ces dames...
Enfin, Abymes tome 3, réalisé avec Bajram, compagnon de Valérie Mangin,enchevêtre Balzac et Clouzot dans la propre histoire des deux auteurs de BD,la première découvrant des années avant sa parution les premiers volumes d’Abymes, que les lecteurs ont sous les yeux, et qui raconte la vie de Mangin et sa rencontre avec Bajram... Le hic, c’est qu’ici l’abîme se transforme en gouffre et que l’histoire du couple n’intéressera à peu près qu’euxmêmes et leur procheentourage. Les private joke succèdent aux anecdotes sur le petit monde la BD,mêlant peutêtre trop la vérité à la fiction et tendant au nombrilisme. On auraitpresque pu se contenter des deux premiers tomes, surtout du premier pour le dessin de Griffo.
Jean-Marc Lernould
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