Au sujet de : Le Livre de Skell - tome 1 article paru originellement en mai 2012 www.actuabd.com
Le Livre de Skell : le nouveau coup d’éclat de Valérie Mangin
Au centre d’un monde ravagé par les guerres, le dieu Steh-Vah s’est imposé comme la lumière vitale des hommes. Sa puissante servante, toute dévouée à sa cause, devra faire face à son humanité.La cité hérétique du roi Azolah a été mise au pas par Skell et son armée. Prêtre-soldat du dieu Steh-Vah, Skell est l’exécutrice de ses volontés. Elle pourchasse les vivants qui veulent se soustraire à l’emprise de l’être supérieur, les purifiant par le feu et la mort. Souhaitant libérer son peuple de l’ascendant du parasite implanté dans chacun de ses sujets, le souverain puni était considéré comme hérétique. Par l’intermédiaire d’une drogue, il engourdissait la subordination imprimée par la part du dieu greffé en eux. Ce parasite en effet, élément nécessaire à la vie, ne pouvait être ôté du sujet qu’en causant la mort de son récipiendaire. Les livres à l’index consultés par le roi déchu sont mis au secret dans la capitale afin de préserver la population de leur néfaste influence. Skell, animée par une foi puissante, est le bras armé de ce dogme musclé mais ses convictions vont vaciller. Des doutes l’assaillent et sa curiosité fera d’elle une paria.
Construit sous la forme d’un diptyque, ce scénario signé Valérie Mangin (Le Fléaux des Dieux), dessiné par Stéphane Servain (l’Histoire de Siloë, l’Esprit de Warren et Le Traque-mémoire, chez Delcourt), nous offre un album de Fantasy à la tonalité oppressante d’un récit post-apocalyptique.
Il se construit sur une dualité opposant foi subordinatrice et raisonnement libérateur. Le dieu, présent en chacun de ses sujets, doit apporter la plénitude au peuple élu mais le prive, du même coup, de son libre-arbitre. Obscurantisme, censure, soumission, prohibition, la religion puissante et inquisitrice empêche toute acquisition de connaissance qui ne lui est pas liée. Ses plus hauts dignitaires peuvent provoquer la déchéance de quiconque. La parabole est claire. Skell joue le rôle principal d’une troublante prophétie. Destinée à entrer dans les cercles les plus élevés du pouvoir, elle paraît, sans pouvoir le contrecarrer, se diriger vers un destin immuable. Comme dans bien des récits mythologiques, l’héroïne est un pion ne pouvant influencer le futur, mélasse temporelle emprisonnée dans les bas-fonds d’une pensée unique, une simple pièce prête à être sacrifier. Ce récit possède des qualités indéniables, mais les enchainements sont parfois capricieux. Les dialogues, peu présents, sont toutefois très précis. L’ensemble de la trame est claire mais on regrette le manque d’approfondissement psychologique qu’aurait mérité le personnage principal dans ce premier tome. Les protagonistes ne sont pas nombreux et tous ont un rôle à jouer. Il n’y a pas de faire-valoir, ni de digression inutile, on va à l’essentiel pour la compréhension et la poursuite d’un récit rapide, peut-être trop rythmé dans son avancement. On souhaiterait savoir plus de choses sur l’héroïne et le monde dans lequel elle se débat. On suppose que le deuxième album ira dans ce sens.
Valérie Mangin s’est en tout cas trouvé un nouveau compagnon de jeu de qualité en la personne de Stéphane Servain dont le dessin et la composition des planches sont remarquables.
Vincent Gautierl
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