Au sujet de : Luxley - tome 2 article paru originellement en septembre 2006 www.bdgest.com
Sainte Inquisition
An de grâce 1199. Ceux que tous appellent les Atlantes dominent l'Europe. Seules quelques poches de résistance existent encore ça et là. Vucub-Nob, le gouverneur maya de la France, peut prévoir l'avenir et donc devancer toutes les actions des Chrétiens. Pourtant il demeure un espoir : le chevalier Robin de Luxley, plus connu sous le nom de Robin des Bois, est mystérieusement parvenu à s'évader des geôles ennemies et est devenu invisible aux yeux des devins atlantes. Mais la Sainte Inquisition, le tout nouveau tribunal créé par le Pape pour contrôler la rébellion, ne croit pas au miracle. Pour Dominique, le grand Inquisiteur, Robin n'est qu'un sorcier, un hérétique qu'il faut éliminer au plus vite !
Le premier tome de Luxley avait quelque peu déçu tant le huis clos, haletant pourtant, exploitait peu l’originalité du scénario, à savoir le choc uchronique entre les civilisations incas et les royaumes européens du moyen-âge. Mangin semble avoir entendu la critique car ce tome 2 offre maintenant une aventure épique via une confrontation armée surprenante entre les rebelles chrétiens et les armées incas. En sortant du château de Vucub-Nob, l’histoire s’épanouit et le lecteur prend conscience de l’ampleur de l’invasion par les peuples d’Amérique.
La rébellion contre les envahisseurs s’organise, connaît ses premiers succès mais doit faire également face à ses premières querelles intestines. Ces différents permettent à la scénariste de ne pas seulement se limiter aux scènes d’action mais également de présenter un conflit finalement beaucoup plus compliqué qu’il n'y paraît. Les scènes de guerre et celles sur le tribunal de l'Inquisition s’agencent parfaitement pour donner un récit épique et dramatique à la fois.
Outre le fait de proposer une aventure originale, cette uchronie permet également aux occidentaux que nous sommes de se mettre à la place de ces peuples précolombiens que la Conquista a décimés. En voyant les royaumes chrétiens ravagés, Rome, la ville éternelle, incendiée, le Pape torturé, les églises remplacées par des temples « païens » et les divisions des peuples opprimés face à leur envahisseur commun, on comprend beaucoup mieux le calvaire que ces civilisations ont vécu.
Cette impression de fin du monde pour notre civilisation en devenir est accentuée par le trait de Ruizgé, qui se fait moins classique et beaucoup plus nerveux. Les scènes de batailles expriment avec beaucoup d’adresse le chaos ambiant, chaos qui est renforcé par un adroit jeu de couleurs, alternant entre l’obscurité et le rouge/orange : les royaumes chrétiens sont réellement tombés en Enfer.
La Sainte Inquisition donne une autre dimension à la la série en exploitant beaucoup plus l’originalité du synopsis de base, sans pour autant tomber dans une intrigue facile, exclusivement centrée sur l’action. Finalement , la grande force d’une uchronie est de mettre le vainqueur de l’Histoire à la place du vaincu et cet album en est la parfaite illustration.
A. Legrain
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