Sidar, une lointaine planète dans un lointain système solaire, une ancienne colonie que les humains sont forcés d’abandonner aux mains des Xressiens, d’horribles rats humanoïdes et expansionnistes. C’est sans compter l’acharnement et l’ingéniosité de Lorrain 1613 AC, qui tient absolument à sauver Sidar et ses habitants ; mais pour se faire il doit d’abord retrouver son double électronique Lionel. Rayons pour Sidar est le 3ième roman de Stefan Wul alias Pierre Pairault écrit en 1957 ; et il fait parti des trois que j’ai lu de cet auteur avec Niourk, choix étrange d’une prof de français de collège et OMS en Série, suite à ma vision du film d’animation de René Laloux : la Planète Sauvage. Cela fait bientôt neuf mois que j’ai gagné un exemplaire de cet ouvrage grâce à Lael, et j’ai vraiment énormément tardé pour le chroniquer, généralement deux cents pages ne m’occupe guère plus de quelques jours. Alors pourquoi maintenant ?
Pour deux raisons en fait : la sortie récente des bandes dessinées reprenant les œuvres de Wul et tout particulièrement celle du premier tome de Rayons pour Sidar le mois dernier, et enfin il me fallait un premier livre pour lancer ma participation au Summer Star Wars II : L’attaque du challenge cloné.
Du livre et de l’histoire originale Ce que l’on peut dire c’est que ce nouveau monde, Sidar, est sauvage, hostile et dépaysant :attention aux papillons et à ce que vous y mangez, et évitez plus que tout les fruits verts, mais par contre le ventre de l’araignée locale est excellent. Stefan Wul s’en donne à cœur joie, descriptions grandioses, scènes d’exploration, rencontres avec de nouvelles cultures et coutumes, c’est à mon sens le point fort de cette lecture : un univers vierge et dangereux, où Lorrain le héros n’aurait pas fait plus de quelques pas sans décéder, s’il n’était accompagné et protégé par son guide indigène Xaog. Autre aspect intéressant, l’auteur introduit le thème des doubles robotiques, que possèdent désormais tous les humains. Alors que l’organique vieillit inexorablement, son double électronique reste la vivante image de la jeunesse, du savoir et de l’intelligence de son maître, et ce jusqu’à sa mort. Un jumeau ou une jumelle ? Non, c’est bien plus fort que ça en fait : je ne vois pas réellement ce qui empêcherait Lorrain de sauver Sidar sans Lionel et pourtant près de la moitié de l’ouvrage est consacré à la recherche Lionel 1613 AC. Même si l’on rencontre peu d’autres humains au travers de ces pages, leur attachement narcissique à leur double immortel est tout aussi fort, ces robots ou androïdes ne sont donc pas que de simple esclaves conçus dans le but de soulager les humain. Petit Hic, je n’ai par contre pas été convaincu du tout par l’explication pseudo-scientifique du plan de sauvetage de Sidar, sans être très grave, c’est quand même un peu dommage, laissons de côté l’écologie impossible de ce monde, on est dans un livre de science-fiction après tout et cela n’est pas gênant, par contre je suis plus contrarié, quand on avance une explication que je considère comme bancale scientifiquement. Peut-être l’auteur aurait-il dû rester aussi flou que dans Niourk, où il évitait ainsi cet écart en proposant pourtant un concept scientifique similaire. Je dois avouer avoir aussi un peu de mal avec l’utilisation de prénoms contemporains pour les protagonistes de l’histoire : Lionel, Daniel, ... C’est peut-être moi, mais je trouve que ça casse un peu l’ambiance. Le roman reste néanmoins très plaisant à lire, grâce à un côté exotique et très rythmé ; et reste une excellente introduction à cet ancien auteur, qui sans être le prince de la science-fiction française, mérite vraiment d’être découvert ou redécouvert !
De sa transposition en bande dessinée Après Niourk, OMS en série et Peur Géante, c’est au tour de Rayons pour Sidar d’être adapté en bande dessinée aux éditions Ankama avec la nouvelle série des Mondes de Stefan Wul. Cette fois se seront Valérie Mangin et Emmanuel Civiello, respectivement au scénario et aux dessins, qui s’occuperont de l’adaptation.Comme tous les albums de cette série, il a été affublé d’une couverture à effet vieilli, je n’ai jamais vu ça ailleurs et je dois avouer que c’est grâce à elle que j’ai remarqué l’album au milieu de la pile de nouvelles bande-dessinées du mois de mai. Est-ce pour insister sur le côté vieillot de l’œuvre ou pour rajouter un côté collector et attiré l’attention ? Je pencherai pour la seconde explication, en tout cas et je serai probablement passé à côté sans même remarquer ce nouveau titre. Ce premier tome intitulé Lorrain, couvre la première partie de l’histoire, et comme justement cette partie est consacré au monde primitif de Sidar, c’est l’occasion d’apprécier le travail Emmanuel Civiello : chaque cases est un vrai délice.
Et si vous n’êtes pas convaincus par cette unique planche, vous pouvez toujours aller admirer les premières planches de ce premier tome ici.Pour l’instant le scénario reste fidèle à l’histoire originale de Stefan Wul, mais comme cette première partie correspond à une mise en place de l’univers, cela aurait été dommage autrement. Le problème c’est qu’il ne s’y passe pas grand-chose, et sans la lecture du livre, on ne sait pas trop dans quelle direction l’histoire s’engage. Un double album aurait sans doute été préférable.J’espère que l’histoire prendra tout son sens avec la sortie du second tome, une bande dessinée, ce n’est pas qu’un assortiment de jolis dessins.
Postface Je ne l’ai pas évoqué plus tôt, mais je me dois d’ajouter une postface à cet article, j’avais parlé il y a quelques semaines de ce que j’appelle l’effet Tintin au Congo, et bien avec cet ouvrage écrit en pleine Guerre d’Algérie on est en plein dedans. Stefan Wul s’est défendu de ne pas faire de politique, mais on n’échappe pas au discours sur la colonisation : du gentil colonisateur, ici l’humain d’Afrance (contraction d’Afrique et de France), qui vient apporter civilisation et protection à ces pauvres peuplades primitives, ... points de suspension et sarcasmes ... Un brin moralisateur en somme. Lorrain en parlant des xressiens : ... colonialisme ... Oh, c’est un vieux vocable du vingtième siècle, remis récemment à la mode pour traduire une expression Xressienne n’ayant pas d’autre équivalent dans la nôtre. Cela signifie à peu près : abus de pouvoir sur les autochtones. On ne peut pas dire que le choix de Lorrain soit mauvais, après tout de deux maux, ou de deux colonisateurs, on choisit le moindre, mais bon il m’est avis que les Sidariens auraient probablement gagné à être laissés en paix par les uns et les autres. À noter que la BD a gardé ce ton paternaliste, mais n’oublie pas de préfacer les planches avec une remise dans le contexte ; elle en profite même pour l’accentuer en affublant Lorrain d’une tenue coloniale des années trente et en reprenant les approximations du langage terrien (ici le français) de Xaog :-) N’étant pas né à cette lointaine époque, et mes parents étant trop jeune à l’époque, il m’est assez difficile d’avoir des témoignages de l’état d’esprit de cette période, mais près de 60 années plus tard, ce ton fait au mieux sourire.Profitez-en, ou pas ce n’est pas souvent que je ferai ce genre d’ajout.
Fanarië
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